Un «dysfonctionnement important». C’est ce dont ont été victimes de nombreux demandeurs d’emploi en 2023, contraints de rembourser des sommes perçues indûment à France Travail (ex-Pôle emploi). Dès le début de l’année dernière, les médiateurs régionaux de l’opérateur public pour l’emploi ont commencé à voir les saisines se multiplier de la part de demandeurs d’emploi seniors, à qui des remboursements de trop-perçus atteignant «couramment» des dizaines de milliers d’euros ont été réclamés, alerte le médiateur national de France Travail, Jean-Louis Walter, dans son dernier rapport annuel, publié ce mercredi 24 avril.

En cause, l’intégration depuis 2022 des flux de données de la Caisse d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat) portant sur la date prévisionnelle de la retraite à taux plein des demandeurs d’emploi dans le système d’information de France Travail. Car lorsqu’une personne en recherche d’emploi atteint l’âge auquel elle peut toucher une pension sans décote (67 ans, voire avant si elle a validé le nombre de trimestres suffisants), France Travail interrompt le versement de l’indemnité chômage (l’allocation d’aide au retour à l’emploi), pour laisser place à la retraite à taux plein.

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Des montants allant de 5 000 à 100 000 euros réclamés par France Travail

Or en croisant ses propres données avec celles de la Carsat, des «décalages importants» entre les dates d’interruption du versement de l’allocation chômage ont été observés par France Travail. Des écarts pouvant aller «de quelques mois jusqu’à plusieurs années», relève le médiateur national de France Travail. Ces décalages s’expliquent principalement par le fait que «les agences (de l’opérateur public pour l’emploi, NDLR) avaient pour pratique de retenir un simple relevé de carrière fourni par les demandeurs d’emploi pour enregistrer la date prévisionnelle de leur retraite à taux plein, au lieu d’exiger le justificatif officiel délivré par les Carsat», peut-on lire dans le rapport. Si Jean-Louis Walter reconnaît que «les chemins de la reconstitution de carrière sont parfois complexes», il pointe aussi «le délai (trop long, NDLR) de délivrance du justificatif officiel» par la Carsat.

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Ce dysfonctionnement dans le croisement des données de France Travail et de la Carsat a conduit à des trop-perçus allant de 5 000 à… 100 000 euros, voire plus ! De quoi «évidemment» générer des situations «critiques» pour les demandeurs d’emploi concernés. D’autant que si France Travail réclame le remboursement de ces sommes touchées par erreur, la Carsat, quant à elle, «ne prévoit pas de rétroactivité dans le versement des pensions de retraite», signale Jean-Louis Walter. Autrement dit, c’est la double peine pour les demandeurs d’emploi : ils ne verront jamais la couleur des sommes qu’ils auraient normalement dû percevoir de la part de la Carsat et ils doivent rembourser un trop-perçu à France Travail.

Dès le mois d’août 2023, le médiateur national de France Travail a adressé une note d’alerte au directeur général de l’opérateur public pour l’emploi. Mais à en croire Jean-Louis Walter, cette situation est toujours «dans l’attente d’un règlement (...) entre les institutions concernées». Pour l’heure, France Travail a saisi la Caisse nationale d’assurance vieillesse «afin qu’un travail en commun puisse s’engager entre les équipes dans l’objectif (...) d’assurer une communication coordonnée vers les Carsat», signale le médiateur. Les demandeurs d’emploi concernés vont donc encore devoir attendre avant de voir leur situation réglée.