Depuis le début de la semaine, les températures glaciales ont de quoi surprendre. A Chaumont (Haute-Marne), le thermomètre affichait -5,2 °C dans la nuit de lundi à mardi. Plus au sud, dans les Alpes-De-Haute-Provence, l’arboriculteur David Ailhaud a même dû se lever toutes les heures pour faire de la «veille antigel», et protéger les 15 hectares de son exploitation de pommes et de poires au Domaine du Pin. «Nous avons des alarmes qui nous alertent si les températures descendent trop bas. Quand c’est le cas, on allume des sortes de gros ventilateurs qui brassent l’air chaud en hauteur pour le rediriger vers le sol et gagner quelques degrés», explique-t-il. Une routine épuisante à ce moment-là, mais indispensable, car sans cela, il perdrait «quasiment toutes les récoltes».

Mais tous ne sont pas aussi bien équipés. Antoine Foulu-Mion, exploitant agricole de la Ferme du Trèfle à Vandeins (Ain), ne dispose que de voiles de protection pour protéger ses cultures de légumes du gel. Les dégâts risquent de lui causer d’énormes pertes et de le plonger dans une situation financière difficile, d'autant plus que ses dettes l’obligent déjà à travailler de nuit en tant qu’ambulancier. Pour pallier les déficits causés, les exploitants vont-ils augmenter leurs prix ?

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Des répercussions sur la hausse des prix dans certaines exploitations

Pour Frank Rosenthal, expert en marketing du commerce, la situation n’est pas nouvelle. «Il y a deux ans, de nombreux orages et chutes de grêle ont fait flamber les prix. Une partie des revenus des agriculteurs avait été amputée, faute de production. Cela a fait monter les cours, c’est un schéma classique», analyse le spécialiste. David Ailhaud n’exclut pas la possibilité d’augmenter le prix de ses fruits à la vente «dans la limite du raisonnable», pour compenser les pertes subies à cause du regel. «Ça peut augmenter de 10, 15 ou 20 centimes le kilo pour certains fruits, confie l’arboriculteur. Mais ça ne va pas prendre 200%, car les consommateurs refuseraient d’acheter les produits», estime le professionnel.

Mais d’une exploitation à l’autre et d’une région à l’autre, la situation varie. «Il va y avoir une conséquence à la hausse des prix sur certaines exploitations, mais les écarts entre les producteurs français peuvent se creuser en fonction des pertes subies», précise Frank Rosenthal. Certains exploitants, pourtant très affectés par le regel, refusent d’augmenter leurs prix de vente, comme Antoine Foulu-Mion, qui souhaite «ne pas faire peser les aléas climatiques» sur sa clientèle.

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Acheter des fruits et légumes au prix le plus bas, est-ce possible ?

Mais donner une estimation précise de l’augmentation des prix reste très difficile. Il y a d’abord les dégâts liés au regel qui ne sont pas encore visibles. David Ailhaud souligne en ce sens que les végétaux sont des êtres vivants qui peuvent avoir «des réactions tardives» liées aux températures très basses. Autrement dit, il y a les fruits qui pourrissent directement, et ceux qui se dégraderont dans les dix prochains jours, sur lesquels il n’a aucune visibilité. Par ailleurs, pour le consommateur qui veut acheter des fruits et légumes au prix le plus bas, il y a les produits importés d’autres pays, qui représentent «plus de la moitié de la production française», selon Frank Rosenthal.

La hausse des prix qui s’annonce est donc à nuancer, car «si on manque de fruits et légumes en France mais qu’ailleurs ils en ont beaucoup, les prix ne vont pas augmenter de manière systématique», estime David Ailhaud. Cela risque en revanche de creuser encore un peu plus les écarts entre les produits français et les autres, tant décriés pendant la crise agricole de ces derniers mois. En espérant que les Saints de glace, du 11 au 13 mai, ne viennent pas perturber davantage la situation.